Publié le 22 janvier 2011
Déficience intellectuelle
Descriptif
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L’enfant atteint de trisomie 21 peut apprendre et progresser considérablement si on lui en donne le temps et les moyens.
Cela signifie qu’il faut adapter les apprentissages au rythme d’acquisition des connaissances de l’enfant, lui faciliter le travail, le stimuler fréquemment, et l’encourager.
Selon Rondal et Lambert (1985), au plan du fonctionnement intellectuel vu sous l’angle des mécanismes (capacité de mémoriser, organisation de la mémoire, raisonnement logique, utilisation du langage intérieur dans la résolution de problèmes, jugement moral, etc), l’enfant atteint de trisomie 21 est souvent approximativement au niveau des enfants normaux de même âge mental.
Cet âge mental (A.M.) est obtenu au terme d’un test d’intelligence générale. Le rapport de l’âge mental à l’âge réel (ou âge chronologique: A.C.) de l’enfant fournit le quotient intellectuel: Q.I.= A.M. / A.C. x 100.
On notera cependant, que des tests plus récents, comme ceux de Wechsler (Wechsler Intelligence Scale for Children -WISC- et Wechsler Adolt Intelligence Scale -WAIS-, traduits et largement utilisés en français), dérivent le quotient intellectuel directement des notes obtenues au test et ne passent donc pas par l’âge mental.
On peut ainsi se faire une idée des capacités intellectuelles de l’enfant atteint de trisomie 21 en le comparant à un enfant normal plus jeune et de même âge mental, ou à peu près. Il y a par exemple, beaucoup de similitudes dans la façon dont un enfant normal de 5 ans et un enfant atteint de trisomie 21 de 10 ans, mais d’un âge mental de 5 ans, perçoivent les choses, s’en souviennent, parlent et raisonnent.
Inutile, cependant, de pousser la comparaison trop loin et de lui faire dire ce qu’elle ne peut dire. Ce type de comparaison fournit des indications sur certains aspects du fonctionnement psychologique de l’enfant atteint de trisomie 21 en comparaison de ceux d’un enfant normal plus jeune.
Cependant, l’enfant atteint de trisomie 21, plus âgé chronologiquement, aura accumulé plus d’expérience de vie, aura d’autres intérêts, d’autres obligations; il se comparera, au plan pratique de l’habillement, des loisirs et des sports qu’il pratique, à d’autres groupes de références que l’enfant normal plus jeune.
De manière générale le niveau intellectuel des sujets atteints de trisomie 21 varie entre un Q.I. 30-35 et un Q.I. 65-70, avec une moyenne située au Q.I. 40-45. Cet écart de variation est une caractéristique importante de ce syndrome, et il faut s’en souvenir. Il faut se garder cependant d’attribuer aux indications sur les capacités intellectuelles des enfants atteints de trisomie 21 une signification qu’elles n’ont pas. On ne croit plus aujourd’hui, comme c’était souvent le cas il y a quelques dizaines d’années, que le Q.I. reflète des capacités intellectuelles transmises héréditairement et fixées une fois pour toutes avant la naissance. Les capacités intellectuelles d’un individu sont en fait le résultat d’une interaction permanente entre les dispositions innées et les expériences personnelles et apprentissages faits tout au long de l’existence et, particulièrement, dans les années de jeunesse.
Ces expériences et apprentissages dépendent largement des conditions dans lesquelles le sujet se développe. C’est pourquoi le développement intellectuel (sans parler du développement affectif, linguistique, etc.) de l’enfant atteint de trisomie 21 est favorisé lorsque l’enfant est élevé dans sa famille et non en institution. Le niveau intellectuel de l’enfant atteint de trisomie 21 dépend donc, pour une large mesure, de ses parents et de l’entourage, et de l’habileté de ceux-ci à lui créer un environnement stimulant.
Il n’est sans doute pas exagéré de dire que le niveau de développement et de fonctionnement intellectuel ultime atteint par l’enfant peut être largement contrôlé par les parents, l’entourage, et les éducateurs.
L’enfant atteint de trisomie 21, comme les autres enfants, est certes ce qu’il est au départ, mais aussi ce qu’on l’aide à devenir.
On rapporte souvent une diminution de QI chez les enfants retardés (atteints de trisomie 21 y compris) au fur et à mesure qu’ils avancent en âge.
Certaines personnes mal informées, y voient parfois une indication décourageante voulant que les efforts éducatifs fournis par les parents et les éducateurs n’aient malheureusement que peu d’effets à terme. Il y a de quoi désespérer les parents les mieux intentionnés et il faut lever l’équivoque.
Lorsqu’on examine la courbe d’augmentation de l’âge mental en fonction de l’âge chronologique des sujets atteints de trisomie 21, on observe qu’elle comporte deux sections : une progression relativement rapide de l’âge mental entre 1 et 15 ans environ d’âge chronologique (cette rapidité est relative car la progression est beaucoup plus lente que chez des enfants normaux); une progression lente jusqu’à 30 ans environ, puis un plateau. Les courbes de progression de l’âge mental varient également quelque peu en fonction du Q.I., comme l’indique la figure ci-après.
Il est facile de comprendre que le Q.I. des enfants atteints de trisomie 21 et d’autres enfants retardés diminue avec l’augmentation en âge chronologique, en raison du fait que l’âge chronologique augmente proportionnellement plus vite que l’âge mental.
Si comme c’est le cas chez l’enfant atteint de trisomie 21, surtout après 10 ans, l’âge chronologique (A.C.) augmente plus vite que l’âge mental (A.M.), alors le rapport entre ces deux âges, c’est-à-dire, le Q.I., diminue.
Chez les sujets normaux, par contre, les accroissements en âge chronologiques et en âge mental vont de pair jusqu’à la fin de la croissance mentale et le Q.I. reste constant, au moins théoriquement.
Cependant, si on établissait le Q.I. d’une personne normale âgée de 50 ans, par exemple, et que l’on comparait son Q.I. à cet âge, avec celui obtenu 20 ans auparavant, on noterait une diminution.
C’est pourquoi les psychomotriciens considèrent que l’attribution d’un Q.I. à une personne qui a dépassé la période de croissance mentale n’a guère de sens.
Revenons aux sujets atteints de trisomie 21 et aux sujets retardés mentaux en général, pour dire que l’abaissement du Q.I. avec l’augmentation en âge chronologique ne signifie nullement que le fonctionnement intellectuel de ces personnes se dégrade anormalement avec le temps, ni que ces sujets soient les malheureuses victimes d’un processus de détérioration intellectuelle précoce. C’est absolument faux. Il s’agit en fait, d’une sorte d’anomalie liée non pas au sujet mais à la mesure du quotient intellectuel. Les parents doivent le savoir et comprendre cet aspect de la problématique du Q.I.
Examinons la perception, l’attention, la mémoire, les activités de catégorisation et de codage ainsi que les interventions du langage (à voix haute et puis, intérieur) dans l’organisation du comportement des enfants atteints de trisomie 21.
Il semble que ceux-ci soient défavorisés par rapport aux enfants normaux, même d’âge mental semblable, ainsi que par rapport aux autres catégories d’enfants retardés mentaux, sur le plan des fonctions sensorielles et perceptives, ainsi que sur celui de la vitesse perceptive.
Les enfants atteints de trisomie 21 discriminent relativement mal, au plan visuel, les détails des objets, tout comme au plan auditif, ils perçoivent mal certaines caractéristiques des sons.
Même constatation pour la reconnaissance des objets et le toucher en général et pour celle des objets à trois dimensions (il s’agit des perceptions dites « stéréognosiques »). Les enfants atteints de trisomie 21 copient et reproduisent souvent mal les figures géométriques, autre indication de la difficulté qu’ils ont à percevoir les stimuli complexes et à mobiliser et organiser leurs programmes moteurs afin de les reproduire.
En ce qui concerne la vitesse perceptive, on peut montrer par des épreuves de temps de réaction que les enfants atteints de trisomie 21 présentent un déficit particulier au niveau de la vitesse de traitement des informations qui leur parviennent.
Il existe des différences entre les enfants atteints de trisomie 21 et les enfants normaux dans les préférences visuelles manifestées pendant la première année.
A 8 mois environ, les enfants normaux centrent de préférence, leur regard sur des dessins qui représentent des solides, des formes circulaires, et, en général, des représentations plus complexes en terme de tracé et de nombre d’éléments impliqués dans le dessin (par exemple, le nombre d’angles), témoignant ainsi de leur capacité de centrer leur attention sur la forme du contour des dessins et des objets ainsi que sur des formes qui ressemblent plus ou moins au visage humain.
A cet âge, les jeunes enfants atteints de trisomie 21 accusent déjà un retard en matière de préférence visuelle, ils se centrent plus volontiers sur des formes moins complexes et ne donnent aucune preuve de l’attention qu’ils portent au dessin des contours ou aux formes assimilables au visage humain.
Sans sous-estimer l’influence de la maturation, signalons qu’un apprentissage peut améliorer leurs capacités perceptives.
La qualité des discriminations perceptives, la vitesse perceptive, et les préférences dans les centrages perceptifs constituent donc des objectifs prioritaires des programmes d’apprentissage et de stimulation précoce des enfants atteints de trisomie 21.
Les capacités d’attention d’un enfant atteint de trisomie 21 sont relativement faibles et notamment inférieures à celles d’un enfant normal de même âge. Il faut en tenir compte pour son éducation, bien mettre en évidence ce qu’on veut lui montrer ou lui faire apprendre et ne pas prolonger les séances inutilement. On peut certes, et il est même vivement conseillé de le faire, entraîner l’enfant à concentrer graduellement son attention sur un objet, une personne, une information auditive, etc…, lui permettant, de la sorte, de se mettre lui-même progressivement dans une meilleure situation pour apprendre.
La faible capacité d’attention des enfants atteints de trisomie 21 semble liée à deux facteurs, eux-mêmes améliorables par des activités éducatives. Il s’agit premièrement, de la difficulté qu’ils éprouvent à habituer leurs réactions d’orientation aux stimuli nouveaux.
Ainsi, lorsqu’il faut examiner des paires d’objets et prendre toujours le plus grand des deux, l’enfant atteint de trisomie 21 est facilement distrait par la couleur et la brillance des objets, ou par tout autre détail non pertinent pour réussir la tâche qui lui est proposée. Il apprendra à négliger ces aspects secondaires au profit d’une concentration sur le facteur « taille » s’il veut obtenir une bonne performance et procéder rapidement aux opérations de tri.
La seconde difficulté à laquelle se heurtent les enfants atteints de trisomie 21, est leur tendance (comparable à celle d’enfants normaux plus jeunes) à répondre avant d’avoir pris le temps de comprendre le problème et d’examiner correctement la situation.
Il faut donc les entraîner à inhiber momentanément leur réponse spontanée de façon à favoriser l’analyse perceptive de la situation en vue d’une réponse ultérieure plus appropriée.
Leur faiblesse se situe au niveau des activités d’organisation du matériel à mémoriser.
Dès qu’il est grandement avantageux d’intervenir activement et spontanément pour organiser ce matériel, les enfants atteints de trisomie 21 se montrent nettement moins efficaces que leurs pairs normaux.
Leur point faible porte surtout sur le rappel verbal inférieur du nom des choses, sur l’organisation économique du matériel à mémoriser pour le retenir plus facilement et sur l’élimination systématique des éléments non essentiels.
Ces stratégies sont sous contrôle volontaire et ce sont des moyens mnémotechniques, au sens large, qu’il leur faut acquérir. Les enfants atteints de trisomie 21 doivent apprendre à généraliser les stratégies ainsi apprises pour les appliquer à d’autres tâches, ce qu’ils ne font pas ou peu, spontanément.
Les enfants atteints de trisomie 21 éprouvent certaines difficultés à classifier les choses et les personnes qui les entourent ainsi qu’à traduire les expériences qu’ils font avec celles-ci en catégories et en concepts.
Cette façon de procéder est pourtant la base de nos activités de pensée. On parle de catégorisation, de conceptualisation et de codage lorsque cette activité est aidée par le langage et notamment par le langage intérieur.
Il faut insister sur le rôle de ce langage intérieur pour l’organisation et le contrôle verbal que nous avons de notre propre comportement : incitation, inhibition, organisation, planification. Ainsi, le fait de pouvoir dire « Je vais faire ceci et ensuite je ferai cela » nous assure une grande supériorité sur le monde animal.
Nous savons que le langage intérieur se développe entre 4et 8 ans chez l’enfant normal par l’intériorisation progressive à partir du langage externe « social » avec une étape intermédiaire facilement observable : « le langage à voix haute, pour soi » (l’enfant se parle à lui-même).
On connaît peu de choses sur le langage intérieur des enfants et des sujets atteints de trisomie 21. Il est possible qu’il soit moins développé et donc de moindre ressource pour les activités de pensée et de contrôle du comportement propre.
On peut favoriser le développement et l’utilisation de ce langage en entraînant l’enfant atteint de trisomie 21 à verbaliser à voix haute dans les tâches qui lui sont confiées et en l’amenant progressivement à réduire l’intensité de ces verbalisations jusqu’au chuchotement et au murmure.
Les capacités de mémoire à court terme, auditives et vocales, sont très limitées chez les personnes atteints de trisomie 21. Les déficits de performances en mémoire à court terme chez les personnes handicapées mentales modérées et sévères ont des répercussions sur la compréhension des autres aspects de leur développement cognitif.
Rappelons qu’une conception courante de la mémoire à court terme est qu’elle fonctionne comme une mémoire de travail responsable du stockage et de la manipulation du matériel durant le déroulement d’autres fâches, comme le raisonnement, la lecture ou le calcul mental. Dans cette optique, les déficits de ce système peuvent avoir des conséquences au niveau du développement des autres habilités.
Les données expérimentales dont nous disposons nous amènent à penser que les capacités de mémoire réduites des personnes retardées mentales modérées en général, et atteintes de trisomie 21 en particulier, constituent un frein à l’apprentissage du lexique.
Grâce à un entraînement systématique de la récapitulation subvocale les capacités mnésiques de ces personnes sont susceptibles d’augmenter de manière substantielle. Il semble cependant que les bénéfices de cet entraînement soient fragiles et qu’il faille le continuer sur une longue période de temps pour maximaliser ses effets.
Source : « Trisomie 21 Syndrome de Down» publié par l’Association de Parents d’Enfants trisomiques 21 (APEM) en Belgique en 1997 et ceci avec leur aimable autorisation.