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Publié le 7 juillet 2011

Grossesse: la fin de l’amniocentèse?

21 février 2002 – l’Hebdo – Philippe Barraud.

 

Perspective très attendue, une simple prise de sang pourrait remplacer une technique efficace mais risquée qui peut provoquer des fausses couches.

L’ amniocentèse est une méthode efficace de détection d’éventuelles anomalies chez le fœtus. Le problème, c’est qu’elle est invasive, tout comme la biopsie de villosités choriales (les membranes externes de l’œuf), et peut déclencher une fausse couche dans un nombre assez élevé de cas (1 %). Cet inconvénient important a amené Patrizia Paterlini-Bréchot et ses collaborateurs (unité Inserm 370, au Centre hospitalier universitaire Necker des enfants malades à Paris) à développer une nouvelle technique permettant d’avoir accès à l’ADN du fœtus sans le mettre en danger.
On sait que des cellules fœtales passent dans la circulation maternelle, mais en très petit nombre: une cellule par millilitre de sang! Or les méthodes immunologiques traditionnelles utilisées pour les détecter ne sont pas assez fiables, on ne saurait donc poser un diagnostic à partir d’une cellule d’origine incertaine. L’originalité du travail des chercheurs français, c’est donc d’avoir développé une méthode permettant de trier les cellules foetales par filtration en fonction de leur taille, tout en s’assurant de leur origine.
Les cellules épithéliales du fœtus sont en effet plus volumineuses que les cellules sanguines de sa mère, on peut donc les filtrer. Elles sont ensuite micro disséquées, leur ADN est extrait et amplifié. À partir de là, on cherche du matériel génétique provenant du père et de la mère, ce qui permet d’affirmer avec certitude l’origine fœtale de la cellule. Dès ce moment, les analyses habituelles de l’ADN visant à établir la présence d’une anomalie génétique pourront s’effectuer.
La technique découverte par Patrizia Paterlini-Bréchot et son équipe, qui fait l’objet d’un brevet, a été testée avec succès sur 13 femmes dont le sang a été prélevé à 11 ou 12 semaines de gestation. Une autre étude a été mise en marche pour préciser le nombre de cellules fœtales circulant à différentes semaines de gestation. Les chercheurs pensent en effet que des cellules sont décelables bien avant la 11ème semaine, ce qui permettrait de poser un diagnostic plus précoce, et épargnerait des angoisses inutiles aux futurs parents.
«En théorie, disent les chercheurs de l’Insert, ce procédé non invasif permet de réaliser tous les tests génétiques actuellement effectués après amniocentèse ou biopsie. » Pour s’en assurer, ils soumettent leur technique à plusieurs études visant à confirmer sa sensibilité pour chaque anomalie que l’on veut détecter.

Diagnostic facilité

Cette percée remarquable est évidemment très attendue. Difficile pourtant de dire quand elle sera couramment disponible. La mise au point de la méthode est en cours, explique un membre de l’équipe de Patrizia Paterlini-Bréchot, qui ajoute que le filtrage des cellules fœtales est assez facile à réaliser et que, avantage supplémentaire vu leur rareté, il ne les détériore pas. Quelques mois, quelques années peut-être de patience donc, et il se peut que l’amniocentèse, à la fois désirée et redoutée, ait disparu.
Avec l’échographie, cette nouvelle méthode non invasive rendra encore un peu plus facile et plus banal le diagnostic prénatal. Les futurs parents, pour des raisons compréhensibles, y sont très sensibles – sans en négliger les inconvénients. Selon une étude du Centre d’évaluation des choix technologiques à Berne, qui vient de sortir (« Bébé en vue, résultats visibles et cachés des échographies», www.ta-swiss.ch), les parents plébiscitent l’échographie, mais disent qu’elle peut susciter des angoisses importantes en cas de suspicion d’anomalie, que le soutien psychologique est insuffisant dans ce cas, et qu’enfin la grossesse s’en trouve encore plus médicalisée. Vouloir savoir a toujours son prix..


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