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Publié le 8 juillet 2011

Un instituteur qui se mouille

septembre 2001 – Revue Insieme – Patrice Neuenschwander
photos Valérie Chételat

Cette histoire raconte l’intégration réussie d’une fillette trisomique dans une classe ordinaire. Elle parle aussi d’un instituteur sensible aux questions relatives au handicap mental, qui a payé de sa personne pour que l’expérience réussisse.

Eddy Ducommun, 48 ans, père de deux enfants, est instituteur depuis un quart de siècle. Il enseigne depuis 18 ans au collège des Vernes, à Colombier (NE). C’est là qu’il a vécu une expérience pédagogique très enrichissante. Pendant deux ans, il a accueilli dans sa classe une enfant trisomique. Arianne a aujourd’hui 13 ans. Elle vient de terminer sa 5ème et dernière année primaire et poursuit sa scolarité dans une classe formée d’enfants avec un handicap intégrée au sein d’un collège secondaire.

Alors qu’Arianne avait dix ans, Eddy Ducommun avait accepté de l’intégrer dans sa classe de 3ème année. L’enfant a ainsi partagé le quotidien de 21 camarades durant deux ans. Accompagnée d’une enseignante spécialisée qui lui dispensait un programme particulier, cette élève participait à tous les cours, à raison de 17 périodes par semaine. Elle est aussi partie en camp vert avec ses copains et copines et y a pris beaucoup de plaisir.

Si ces deux ans d’intégration scolaire furent incontestablement une réussite, tout n’a pas toujours été facile. L’instituteur qui ne disposait d’aucun recul, a procédé de façon empirique, testant différentes méthodes d’enseignement. Il a vite compris qu’il ne fallait pas trop exiger d’Arianne sous peine de la faire souffrir. Eddy Ducommun s’est toujours efforcé de veiller au confort affectif de son élève différente. Lorsqu’il a perçu des tensions chez la fillette, il a demandé l’aide d’un psychologue.

Un jour d’hiver, Arianne a refusé de descendre dans la cour pour la récréation. Il y avait de la neige et elle avait peur de se faire mal. Et puis, il fallait s’habiller toute seule…. La corde à sauter des autres fillettes l’a aussi parfois effrayée. Pourtant, en règle générale, elle évoluait tout à fait naturellement parmi les autres élèves et interagissait avec eux. Elle a vécu plein d’expériences enrichissantes qui l’ont fait beaucoup progresser. Son instituteur est catégorique: cette enfant aurait certes acquis davantage de connaissances en institution mais n’aurait pas évolué autant.

Les camarades d’Arianne étaient plutôt sympathiques avec elle. Ils l’invitaient à leur anniversaire et ne faisaient preuve d’aucune pitié particulière à son égard. Cette élève trisomique a même permis à la classe un moment perturbée de se ressouder autour d’elle. Tous les enfants se sont sentis responsables de ses progrès. Ils l’applaudissaient lorsqu’elle réussissait quelque chose. Ils ont eux aussi beaucoup appris à son contact, se familiarisant avec la trisomie. Aucun d’eux ne sera plus jamais effrayé à la vue d’une personne avec un tel handicap.

Cette expérience aurait très bien pu s’arrêter au terme de la 4ème année si une jeune institutrice n’avait pas accepté de reprendre le flambeau. Toutefois, les exigences scolaires augmentant, certains parents ont alors exigé – et obtenu – qu’Arianne sorte de la classe durant les leçons de math et de français. Ils prétendaient qu’elle retardait la progression des autres élèves… D’autres parents et certains enseignants pensaient que l’on en faisait beaucoup pour une fillette dont la véritable place était en institution, et cela au détriment d’enfants « normaux » mais en difficultés scolaires, qui ne bénéficiaient pas, eux, d’un enseignant de soutien. Plusieurs collègues d’Eddy Ducommun auraient eux aussi préféré que les francs dépensés dans cette tentative d’intégration soient affectés au soutien d’élèves sans handicap rencontrant des difficultés scolaires.

Tout au long de ces deux ans, Eddy Ducommun n’a jamais soldé son enseignement et a toujours respecté le programme. Quant à Arianne, il assure qu’elle n’a à aucun moment perturbé la classe. Cette fillette a beaucoup progressé au contact de ses camarades qui ont appris à ses côtés la tolérance et apprivoisé la différence. Malgré le surcroît de travail et les difficultés, l’instituteur se dit prêt à recommencer.

Intégration scolaire

L’histoire de cet instituteur pas comme les autres qui accueille dans sa classe une élève peu ordinaire est tirée d’un ouvrage intitulé « Intégration : l’école en changement – expériences et perspectives « , édité par Isaline Panchaud et Heidi Lauper. Ce livre publié conjointement par insieme et HIKI paraît cet automne chez Haupt, à Berne. Il rassemble des témoignages de parents ainsi que des réflexions et analyses de spécialistes des questions d’éducation et contient plein de conseils et d’adresses utiles pour qui veut intégrer son enfant différent dans une classe ordinaire.

A commander au secrétariat central d’insieme ou en librairie.


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