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Publié le 29 septembre 2011

Trisomie 21, quels progrès?

mars 2010 – Journal des 10 ans d’ART 21

Docteur Ariane Giacobino et Professeur Stylianos E.Antonarakis
Service de MédecineGénétique, HôpitauxUniversitaires de Genève et Faculté deMédecine de Genève


Glossaire

ADN (Acide désoxyribonucléique) : support de l’information génétique
Gène : unité d’information génétique, composée d’ADN
Génome : ensemble du matériel génétique dont le support est l’ADN.
Génotype : information contenue dans les gènes d’un individu.
Phénotype : ensemble des caractéristiques d’un individu résultant de l’expression de ses gènes et de leurs interactions avec l’environnement.


Approximativement 0.45% des conceptions humaines sont trisomiques pour le chromosome 21. L’incidence est influencée par l’âge maternel. La prévalence de la trisomie 21/syndrome de Down à la naissance est d’environ 1/700.

Elle est restée globalement la même durant ces derniers 20 ans, bien que deux changements importants aient joué un rôle dans le nombre de grossesses avec un diagnostic de trisomie 21 : d’une part, l’âge maternel s’est vu augmenter progressivement, et d’autre part, les possibilités de dépistage anténatal de la trisomie 21 se sont améliorées. Dans les pays industrialisés, l’espérance de vie de ces personnes est actuellement d’environ 55 ans.

Une importante étape a été franchie lorsque le séquençage complet du chromosome 21 a été terminé, en 2000, et a permis d’identifier le contenu en gènes et autres portions de séquence de ce chromosome. Ce chromosome représente 1% du génome total. Le bras long du chromosome est estimé comporter entre 260 et 370 gènes codant pour des protéines. On trouve aussi des pseudo-gènes, entre 30 et 80, qui eux ne codent pas pour des protéines. Il existe également des régions non-géniques conservées, qui ne codent pas pour des protéines, mais dont la conservation à travers l’évolution et les espèces indique un rôle fonctionnel probable, mais encore inconnu. Ces régions couvrent le 3% environ du chromosome 21. Il y a des portions variables dans le chromosome 21, sous forme de changements ponctuels dans l’ADN (polymorphismes) ou de fragments de séquences répétitives. On estime cela à un peu moins de 1% du chromosome. De petites molécules, microRNAs, issues du chromosome 21, sembleraient jouer un rôle dans des aspects de régulation, mais leur fonction n’est pas clairement établie.

En examinant les chromosomes 21 surnuméraires chez les individus avec un syndrome de Down, il a été démontré que la présence d’une portion seulement du chromosome 21 en plus (trisomie 21 partielle) pouvait être responsable des caractéristiques communes de la trisomie 21. Ainsi, on a défini des régions spécifiques du chromosome (ou régions de susceptibilité) pouvant être responsables, vu leur contenu en gènes spécifiques, de certains des aspects phénotypiques du syndrome de Down. La présence d’une copie surnuméraire du chromosome 21, ou d’une portion de son bras long, résulte dans l’expression augmentée de nombreux gènes, et de ce fait, est en lien avec les différents problèmes associés à la trisomie 21. Il y a donc une question de dosage de gènes spécifiques (ou sensibles) qui auraient un effet direct ou indirect sur le phénotype, alors que d’autres gènes, même si présents en 3 copies n’auraient pas de conséquences sur le phénotype.

Ainsi, des expériences de dosage de gènes dans des cellules trisomiques pour le chromosome 21, seuls 30% des gènes étaient trouvés trop exprimés, et 15% avec une expression fortement variable entre les individus. Les interactions entre les gènes, les autres régions du chromosome qui ne codent pas pour des protéines, les régions variables et le fonds génétique individuel contribuent certainement aux variations phénotypiques entre les individus avec un syndrome de Down.

Parmi les gènes dont l’importance s’est révélée récemment, nous trouvons ceux associés à certaines des caractéristiques de la trisomie 21 telles que le déficit cognitif, les défauts moteurs, et certains ont aussi été suggérés être impliqués dans des maladies neurodégénératives. Des recherches sur la souris montrent que dans ces gènes candidats, on en trouve exprimé chez l’embryon dans des stades très précoces du développement et chez l’adulte, et en particulier dans du tissu du système nerveux, tel que le cervelet, les bulbes olfactifs et l’hippocampe. Le fait d’en modifier chez la souris le niveau d’expression a permis de reproduire certains des aspects de la trisomie 21. Les essais d’intégrer des copies supplémentaires de certain gènes ont apporté des troubles de la mémoire et du développement chez les souris. Par contre, les souris chez lesquelles les 2 copies de l’un de ces gènes candidats ont été complètement inactivées meurent durant la vie embryonnaire. Les investigations se poursuivent et permettront certainement dans le futur de comprendre le fonctionnement ou éventuellement le développement cérébral caractéristique de la trisomie 21. Certaines recherches se penchent sur la possibilité thérapeutique de modifier l’expression de certains de ces gènes candidats chez la souris.

L’étude de souris modèles pour la trisomie 21 est un outil important pour tenter de comprendre la physiopathologie du syndrome. Un certain nombre de souris avec des portions de génome en excès, correspondant à la trisomie 21, ont été réalisées en laboratoires ces dernières années. Les différents modèles comportent des fragments trisomiques différents, mais tous correspondants à des portions du chromosome 21 humain ou des portions du chromosome 16 de souris (qui est l’homologue chez la souris du chromosome 21 humain). Parmi ces modèles : les souris Ts16 (environ 700 gènes en excès du chromosome 16 de souris), Ts65Dn (environ 95 gènes en excès du chromosome 16 de souris), et Ts1Cje (environ 70 gènes en excès du chromosome 16 de souris) et Tc1 (plus du 90% des gènes du chromosome 21 humain en excès). Ces modèles sont essentiels pour tenter de comprendre quels sont les gènes dont le dosage est critique et les mécanismes pathologiques en cause. Ainsi, la surexpression de certains gènes correspondant au chromosome 21 humain a abouti chez les souris à des troubles de l’apprentissage et de la mémorisation. Le type de troubles de la mémoire (mémoire court-terme versus mémoire long-terme) est en cours humain ou des portons du chromosome 16 de souris (qui est l’homologue chez la souris du chromosome 21 humain). Parmi ces modèles : les souris Ts16 (environ 700 gènes en excès du chromosome 16 de souris), Ts65Dn (environ 95 gènes en excès du chromosome 16 de souris), et Ts1Cje (environ 70 gènes en excès du chromosome 16 de souris) et Tc1 (plus du 90% des gènes du chromosome 21 humain en excès). Ces modèles sont essentiels pour tenter de comprendre quels sont les gènes dont le dosage est critique et les mécanismes pathologiques en cause. Ainsi, la surexpression de certains gènes correspondant au chromosome 21 humain a abouti chez les souris à des troubles de l’apprentissage et de la mémorisation. Le type de troubles de la mémoire (mémoire court-terme versus mémoire long-terme) est en cours d’investigations avec la souris Tc1, et des données récentes ont montré une altération du nombre de composants des synapses dans l’hippocampe des souris Ts65Dn. Pour la maladie d’Alzheimer à début précoce, dont la fréquence est plus élevée chez les personnes avec trisomie 21, un certain nombre de caractéristiques neurodégénératives ont été observées chez les souris modèles, dont la perte précoce de certains neurones, comme dans la maladie d’Alzheimer. Le croisement de ces souris avec d’autres ayant un fond génétique différent permettra aussi de comprendre le rôle des interactions avec le reste du génome dans la variabilité du phénotype du syndrome de Down.

Un des buts de la recherche génétique actuelle est de comprendre le lien entre les gènes présents en 3 copies, la présence de certains traits phénotypiques et la variabilité de certains autres : il s’agit d’établir des corrélations entre le génotype et le phénotype. Il est essentiel de définir ou de mesurer le niveau d’expression des gènes présents en 3 copies, dans les différents tissus, comme par exemple dans le cerveau et essayer de comprendre comment cet excès d’expression produit un phénotype spécifique. Important également de voir à quel moment du développement, ces niveaux d’expression peuvent changer. Il est tout à fait possible que l’excès d’expression de gènes du chromosome 21 entraîne un changement dans l’expression de gènes sur d’autres chromosomes, donc des phénomènes de régulation complexes. Par ailleurs, l’étude des régions conservées non-codantes du chromosome 21 et du reste du génome va certainement permettre d’avancer la compréhension de ces phénomènes de régulation et préciser leur rôle dans la variabilité du phénotype.

Les efforts de développement et d’utilisation de méthodes standardisées d’évaluation seront certainement un plus tant pour des estimations précises des performances intellectuelles que pour permettre dans le futur, lorsque des moyens pharmacologiques d’amélioration des processus cognitifs seront disponibles, d’en mesurer précisément les effets. Un autre des intérêts du développement de souris modèles est la possibilité d’essais thérapeutiques pour certains aspects de la trisomie 21, notamment l’amélioration des fonctions cognitives ou de la mémoire. Ceci est en cours d’étude sur ces modèles. L’évaluation de l’effet de substance, d’effets indésirables potentiels, doit passer par ce type d’expérimentation d’abord. Parmi les thérapies et différents agents pharmacologiques envisagés, des essais prometteurs, en particulier sur la souris modèle Ts65Dn semblent pouvoir améliorer l’apprentissage et la mémoire des des souris adultes. Ceci est très  encourageant et fait penser que des améliorations par des thérapies postnatales sont envisageables. Bien entendu, il faudra encore démontrer l’efficacité et les bénéfices par des essais cliniques chez les humains.

Finalement, les avancées dans les thérapies du syndrome de Down donneront également une ouverture sur la compréhension d’autres maladies, dont certains mécanismes physiopathologiques et génétiques pourraient être communs, comme par exemple la maladie d’Alzheimer ou les malformations cardiaques. Pour continuer à progresser dans la compréhension des mécanismes moléculaires physiopathologiques impliqués dans la trisomie 21 et ses manifestations, et pour évaluer les possibilités thérapeutiques, les scientifiques et les familles doivent plus que jamais collaborer et poursuivre leurs efforts.


Dans cette optique, le Dr Ariane Giacobino, du Service de Médecine Génétique des Hôpitaux Universitaires de Genève, sous l’impulsion du Professeur Antonarakis, débutera dès le 21 mars 2010 (Journée mondiale de la trisomie 21) une consultation dédiée spécifiquement à la Trisomie 21.

Service de Médecine Génétique
Centre Médical Universitaire
1 Michel-Servet, 1206 Genève
Secrétariat du Service (consultations):
tél. 022 379 56 96


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