Publié le 7 juillet 2011
«J’espère rester ici pour toujours»
16 décembre 2006 – Le Nouvelliste – Nadia Esposito
INTÉGRATION: Démarche unique en Suisse, la Coop engage des collaborateurs en situation de handicap pour son front de vente. Portrait avec Julie Delez de Bramois qui s’occupe du rayon chocolats et cafés dans le supermarché sédunois.
Elle aime la «Star Academy», écoute Patrick Bruel et pratique la natation pour garder la forme. Julie Delez, 19 ans, est comme toutes les filles de son âge. A peu de choses près qu’elle souffre d’une légère trisomie depuis sa naissance. Après avoir passé sa jeunesse dans différents établissements spécialisés, elle travaille aujourd’hui à la Coop City de Sion, où elle s’occupe du rayon chocolats et cafés. Un modèle de réussite du projet d’intégration mené conjointement par Coop, la FOVAHM et l’association Passerelles (lire encadré « Le Valais précurseur » ci-dessous).
Pas mettre les mains dans les poches
Julie a commencé dans le centre sédunois le 1er décembre dernier. Dans deux semaines, elle pourra décider de continuer ou de retourner dans les ateliers proposés par la FOVAHM. Cette nouvelle situation professionnelle n’est pas facile tous les jours pour la jeune demoiselle. «Des fois le soir on a mal au dos et mal partout. Mais ça va, je suis toujours en forme», raconte-t-elle d’un large sourire et d’une bonne humeur communicative. Il faut dire que ses journées sont bien remplies. «Je range les rayons, je remplace quand il manque des cafés ou des chocolats. Et des gens viennent me poser des questions pour trouver les choses.» En tant que nouvelle collaboratrice du centre Coop City, la Bramoisienne doit suivre à la lettre le règlement du magasin, à la même enseigne que tout le reste du personnel. «Je dois pas mettre les mains dans les poches. Et pas aller trop souvent aux toilettes. Et puis faut être poli, toujours dire salut, bonjour!» Une obligation qui ne dérange pas la nouvelle employée modèle. «Elle n’est pas du tout timide et très souriante. Il n’y a donc aucun souci avec les clients», constate Johnny Bonvin, gérant du magasin de Sion. «C’est une très bonne recrue, je suis très fier d’elle, comme de toute l’équipe d’ailleurs.» Une reconnaissance de la direction très importante et qui permet à ce projet d’intégration de fonctionner. «Chez nous, tous les collaborateurs sont partie prenante pour stimuler et donner confiance à ces personnes un peu différentes. Elles évoluent ainsi dans un environnement normalisant.»
La force du badge
Tout comme les autres employés, Julie doit porter le badge où est inscrit son nom ainsi qu’une tenue aux couleurs du magasin. Un signe très fort perçu comme une rare normalisation. «Ça m’a fait bizarre au début. Mais quand je suis avec, je me sens comme tout le monde», souligne la jeune demoiselle, émue. Si Julie et les autres handicapés travaillent au même rythme que leurs collègues pour les vacances et les congés, ils bénéficient d’un horaire quotidien légèrement plus souple. «Je commence à 7 h 30.A 9 h et 11 h j’ai une pause de vingt minutes. Et à 13 heure je dîne. Et après plus de pause jusqu’à la fin, à 4 h. On bosse plus l’après-midi mais ça motive. Et des fois je ne vois pas le temps passer, je regarde la montre et c’est déjà l’heure.» Mais ce que Julie préfère dans ce nouveau travail, c’est le contact avec la clientèle et les visites de la famille. «Des fois il y a mes parents, mes cousins cousines, mes tantes qui viennent me voir. Si je réussis le stage, je ferai la fête avec eux, car j’espère rester ici pour toujours.» Avant cela, une autre petite fête se profile pour la jolie blondinette. «Demain c’est mon anniversaire. Toute ma famille et mes amis seront là», se réjouit-elle en regardant la montre… Eh oui la pause est déjà terminée, il s’agit de se remettre à la tâche, comme une employée modèle.
Le Valais précurseur
Depuis le 1er octobre, Coop et la FOVAHM travaillent à l’intégration progressive de huit personnes en situation de handicap dans le magasin Coop City de Sion.
Aujourd’hui, sept d’entre elles font partie de la cinquantaine de collaborateurs que compte la partie alimentation. Elles sont toutes encadrées par un maître socio-professionnel. Une huitième les rejoindra début 2007. Cette forme d’intégration, qui a déjà été menée dans le magasin Coop à Collombey, est «unique en Suisse. Les handicapés exercent un travail les mettant en contact direct avec les clients. Ils œuvrent dans le magasin et pas uniquement dans ses dépôts. C’est dans ce sens que ce projet est vraiment nouveau», explique Jean-Marc Dupont, directeur de la FOVAHM.
Cette intégration professionnelle se fait par étape. La personne en situation de handicap fait tout d’abord un stage d’un mois. A la fin de celui-ci, un bilan est établi avec le collaborateur, ses parents, le maître socio-professionnel et la direction de la Coop. La personne peut alors décider si elle veut continuer ou retourner dans un atelier de la FOVAHM. Cette action est soutenue par l’association Passerelle qui œuvre pour l’intégration des personnes en difficulté.